jeudi 26 mai 2011

"These violent delights have violent ends."
                                                   William Shakespeare

mardi 17 mai 2011

La liberté est un immense vide de potentialités à remplir de sa volonté propre uniquement. L'absence de limite se traduit aussi par l'absence d'étai et peut se révéler effrayante. La plupart d'entre nous ne possède pas la force interne suffisante pour tracer son chemin dans ce vide. L'homme se rassure de ses contraintes. Il se forge une cage et oublie qu'il en tient la clé dans ses mains.

lundi 16 mai 2011

Il reste les racines.
On sait à quel point elles sont profondes quand on cherche à les arracher.

lundi 9 mai 2011

Antigone

Antigone


Jean ANOUILH
1944

Cette pièce est probablement ma favorite. C'est un monument. La force, le courage et l'honneur sans faille qui caractérisent son héroïne en ont fait une oeuvre très à propos au moment de sa publication, en contexte de fin de guerre.
En règle générale, je n'approuve pas les réécritures des drames antiques. Ces classiques d'une époque très lointaine devraient conserver leur position de sacré et ne pas être touchés. J'ai en tête Phèdre. Par réflexe, vous me direz "Phèdre, de Racine". en fait, Phaedre est un merveilleux drame amoureux relaté par Euripide près de cinq siècle avant notre aire. Racine a fait de Phèdre une vieille marâtre acariâtre, alors qu'à l'origine, Phaedre était une superbe et jeune héroïne d'ascendance divine emportée par la tragédie de sa destinée.

Qu'en est-il d'Antigone ? Anouilh a sublimé son héroïne. Elle est l'incarnation de la rébellion mais surtout et peut-être plus encore que dans l'oeuvre antique, elle est la figure de la liberté, à la fois soumise à sa destinée et contre celle-ci.
L'histoire, tout le monde la connait. Créon le roi, son oncle, prend des décisions politiques difficiles et injustes mais ramenant l'ordre dans sa cité. La dépouille de l'un des deux frères d'Antigone, tous deux morts en s'affrontant pour le pouvoir, doit pourrir aux vues de tous. Antigone fait ce qu'elle considère être son devoir : elle se lève la nuit pour rendre les derniers hommages à son frère, malgré le décret royal qui la condamnera à mort. Lorsque Créon le roi lui propose de garder le silence et de tout remettre en ordre, ce qui implique de déterrer la dépouille de Polynice, Antigone dit non. Elle recommencera, c'est son devoir. Ce drame est celui de la dualité. Celle entre le légitime et le raisonnable, celle entre le bien général et la moralité, celle entre Antigone la rebelle et sa soeur douce et rangée, entre les deux frères, l'un juste et l'autre avide, etc.

Là où l'auteur a sublimé son héroïne, à mon sens, réside dans cette autre dualité ou plutôt un paradoxe apparent que j'évoque plus haut. Antigone choisit de se rebeller contre les lois dictées par son oncle le roi. En vérité, la liberté de l'héroïne est celle de se soumettre à sa destinée. Elle est fille de roi, l'honneur et le devoir coulent dans son sang : "Dis-leur de me lâcher. Je suis la fille d'OEdipe, je suis Antigone. Je ne me sauverai pas." Son devoir est d'enterrer son frère et d'assumer ce qu'elle est, quelqu'un qui a la force et le courage de ses convictions, jusqu'à le payer de sa vie. La façon dont Anouilh a traité cette oeuvre, comme un acte joué par des acteurs-personnages déjà au courant du drame qu'ils vont interpréter,  met en avant ce point de vue en particulier.
Jean Anouilh semble dire "trouvez qui vous êtes, lâche ou héros, meneur ou suiveur, responsable ou insensé, et assumez-le jusqu'au bout".

vendredi 6 mai 2011

Aliénor... Tu es un baobab.

Le Voyage d'hiver

Le Voyage d'hiver
Amélie Nothomb

Paru en 2010

Difficile d'élaborer une critique sur un souvenir. Le livre en question m'est tombé dans les mains l'année dernière puis a regagné l'étage de son attentionnée propriétaire depuis. Je me dois d'acheter un bel exemplaire broché. En attendant, je vous expose ce dont je me souviens.
Commençons par le bilan. On n'est pas des scientifiques, on peut faire le développement après !
Bilan donc.
Wow. La gifle. Amélie Nothomb peut se révéler être dans ses bonnes années un véritable génie de la littérature. Rien de moins. Il est vrai, je n'avais pas eu la joue rouge à ce point depuis son premier roman (et quel premier roman...) Hygiène de l'assassin, qui reste l'un des joyaux couvés de ma bibliothèque.
Revenons à nos moutons (quelle étrange expression). Le voyage d'hiver possède une intrigue profonde, voire grave, traitée en toute légèreté par le formidable cynisme de l'auteure. Cette intrigue s'articule tout autour d'une seule problématique. L'amour. L'amour en lettres capitales, celui qui déborde même encore du mot qui est censé le contenir, la passion amoureuse, l'obsession amoureuse, transcendée par l'abnégation la plus totale. Eh bien cet amour est contrarié, il est impossible, et pour une raison plutôt débile (c'est le cas de le dire).
J'aime particulièrement la façon dont Amélie parle de l'amour. Elle ne l'analyse pas, elle le montre, voire le démontre, en toute simplicité. "L'amour, voilà ce que ça fait", plutôt que "l'amour, voilà ce que c'est". Et elle n'a aucun complexe concernant les hyperboles.

Prenons maintenant l'angle de la langue en tant qu'outil, vu par Amélie Nothomb. Les codes volent en éclat s'ils le doivent, avec beaucoup d'impertinence. Pour ceux qui ont lu, se référer au trip ; pour les autres, le trip en question est une prise de psilocybes. Le lieu, un appartement frigorifié, le résultat, un mur blanc qui prend toute sa dimension et un parquet qui révèle un monde de glace subaquatique. Voilà ce qu'est le voyage d'hiver.

En regard du froid omniprésent et de l'étrangeté qui qualifie aussi bien les personnages que la situation, ce livre avait déjà tout pour me plaire. Rajoutons un élément subtile qui en fait un chef d'oeuvre, le personnage principal paraît être un type tout à fait banal à la base et se révèle être, eh bien... Nothombien.


Autoportrait